Présentation

Le chantier Autoreprésentation et plaideur citoyen fait suite à une première recherche financée par le Fond québécois de recherche société culture (FQRSC) intitulée Seul devant la justice. Défis et enjeux posés par les justiciables qui se représentent eux-mêmes devant les tribunaux civils. Dans le cadre de ce premier projet, outre la revue exhaustive de la jurisprudence et de la littérature grise, juridique et scientifique, l’équipe de recherche a mené un important terrain de recherche par le moyen d’observation d’audiences. Une première série d’observations exploratoires a été faite à la Division des petites créances de la Cour du Québec à l’automne 2014 ; la collecte des données s’est ensuite déroulée au Tribunal administratif du Québec durant l’été 2015.

Cette première recherche a permis de poser plusieurs constats : la recherche démontre sans équivoque les obstacles financiers à la représentation par avocat (près de 90% des plaideurs citoyens déclarent ne pas avoir les moyens de payer pour les services d’un avocat[1] ; la littérature juridique traite généralement la question comme s’il s’agissait d’un choix délibéré[2]. Alors qu’il est généralement admis que le risque lié à l’autoreprésentation doit être assumé par le plaideur citoyen lui-même[3], la question de ses droits, de l’intégrité du système judiciaire et de son accessibilité ou plus généralement de ce que révèle ce phénomène sur le (dys)fonctionnement du système judiciaire ne fait l’objet d’aucune discussion de fond[4]. En outre, selon nos observations, la réponse des acteurs du système judiciaire à la présence de plus en plus importante de plaideurs citoyens est très variable, alors que les outils mis à leur disposition ne semblent pas permettre une préparation adéquate et satisfaisante au contact avec la justice.

Dans le cadre du projet ADAJ, une seconde phase de recherche aura pour objectif dans un premier temps, en interrogeant directement des plaideurs citoyens, de déterminer quels outils et moyens pourraient être mis à leur disposition pour les soutenir dans leur quête de justice. Il s’agira dans un second temps de concevoir les modalités par lesquelles ces outils et moyens pourront être proposés, sous forme de projet-pilote, dans une clinique juridique communautaire. L’équipe de recherche monitorera la mise en place du projet pilote par le moyen d’observations en clinique et au Palais de justice et d’entrevues ponctuelles avec les avocats et les plaideurs citoyens. Finalement, un postmortem permettra de recueillir les impressions et observations des avocats et des plaideurs citoyens sur l’expérience.


[1] Julie Macfarlane, The National Self-Represented Litigants Project : Identifying and Meeting the Needs of Self-Represented Litigants, Rapport de recherche présenté aux fondations du droit de l’Ontario, de l’Alberta et de la Colombie-Britannique, mai 2013 : http://www.lsuc.on.ca/uploadedFiles/For_the_Public/About_the_Law_Society/Convocation_Decisions/2014/Self-represented_project.pdf

[2] Par ex : Michel Tétrault, « Éthique et déontologie en droit de la famille. Le litige familial, la déontologie et l’Éthique : mais qui est contre la vertu ? », dans Barreau du Québec, Congrès du Barreau : À la mesure du panorama, juin 2010 : https://biblio.caij.qc.ca/pdf/CDB10_Tetrault_30.pdf

[3] Par ex : Ménard c Gardner, 2012 QCCA 1546 au para 58 : « celui qui choisi d’agir sans avocat doit en assumer les inconvénients et ne peut ordinairement pas se plaindre des conséquences de sa méconnaissance du droit, incluant les règles de preuve et de procédure du moins lorsqu’il a reçu l’aide que le tribunal doit lui accorder » : http://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2012/2012qcca1546/2012qcca1546.html?autocompleteStr=Ménard%20c%20Gardner%2C%202012%20QCCA%201546%20&autocompletePos=1

[4] Emmanuelle Bernheim et Richard-Alexandre Laniel, « Un grain de sable dans l’engrenage du système juridique. Les justiciables non représentés : problèmes ou symptôme ? » (2013) 31 Windsor Y B Access Just 45 : http://ojs.uwindsor.ca/ojs/leddy/index.php/WYAJ/article/view/4310; Emmanuelle Bernheim et Richard-Alexandre Laniel, « Le droit à l’avocat, une histoire d’argent » (2015) 93 R du B can 1 : http://www.archipel.uqam.ca/7438/1/bernheim-et-laniel_rbc.pdf

Ce contenu a été mis à jour le 13 septembre 2016 à 10 h 37 min.